La culture en musique

Aller au contenu | Aller au menu | Aller à la recherche

mercredi, mars 31 2010

Festival Muzzix

Pour sa 10e édition, le festival Muzzix, spécialisé dans le jazz, les musiques improvisées et expérimentales, investit pendant trois jours la Gare Saint-Sauveur et invite à découvrir des univers sonores singuliers.

Les participants à Muzzix sont invités à se réapproprier leurs oreilles. Il faut qu’ils réapprennent à écouter. Qu’ils redeviennent actifs dans l’écoute ; de la musique, des sons de la vie », souhaitent Yanik Miossec et Peter Orins, les directeurs artistiques de la manifestation. Pendant trois jours, du 2 au 4 avril, le festival Muzzix se pose ainsi à la Gare Saint- Sauveur. Une belle occasion d’ouvrir grand ses oreilles et de partir à l’aventure. Car l’entrée du festival est gratuite et le collectif Muzzix a concocté un programme alléchant. « Nous accueillons des démarches artistiques qui nous semblent intéressantes. Peu importe la renommée des artistes, Muzzix invite aussi bien des musiciens locaux, régionaux, que des artistes internationaux. » Vendredi soir et samedi soir, le festival propose une série de concerts, « du jazz à la noise, du rock à la musique expérimentale ». On retiendra notamment Cheresse, un rock « dans l’esprit de Shellac » ; Le Dépeupleur, duo d’ordinateurs noise et bruitiste ; MTM, le trio jazz de Jacques Mahieux ; ou encore Audrey Chen, violoncelliste américain férue de musiques expérimentales. Il y aura même aussi de la chanson avec Numéro H (Sam Bodart à la batterie et au chant) et Mafalpa, « entre chanson expérimentale et improvisation ».

Intimité sonore

Les après-midis du samedi et du dimanche, la Gare Saint-Sauveur sera le champ d’expérimentations multiples. Thierry Madiot et Zyph proposeront des massages sonores, soit un travail sur « l’intimité de l’écoute », avec la vue cachée et un casque sur les oreilles pour réécouter des bruits doux et fins du quotidien. Plusieurs musiciens se donneront, eux, en petit concert de salon : une prestation de 15 minutes pour quinze personnes dans un espace réduit. Autre moment d’intimité sonore, avec les nombreuses bornes d’écoutes qui permettront de se réapproprier des sons de forêts, de rivières, d’animaux, de villes ou de ports. Toujours l’après-midi, les enfants apprécieront les trompes et les tubes monumentaux de Thierry Madiot, et les ciné-concerts avec les musiciens Stefan Orins (piano) et Éric Navet (percussions) qui joueront en direct. Au programme : « Frigo et la baleine » de Buster Keaton, et « La Princesse aux huîtres » de Ernst Lubitsch. Enfin, moment fort de ce week-end, la création du spectacle « Shannon », sur le langage et l’échange, avec un guitariste, une comédienne sourde et une chanteuse. Cet opéra de poche est une production du collectif Muzzix qui organise le festival et réunit 35 musiciens aguerris du Nord-Pas-de-Calais. En plus du festival, dont c’est la 10e édition, le collectif réalise toute l’année un travail de terrain conséquent pour faire connaître des musiques différentes et des projets musicaux passionnants. Ce weekend de découverte à la Gare Saint-Sauveur, ouvert à tous, devrait les y aider grandement.

Gare Saint-Sauveur, avenue Jean-Baptiste-Lebas, Lille. Du 2 au 4 avril. Avec notamment : concerts de Numéro H, Cheresse, Le Dépeupleur (2 avril, à partir de 19h) ; massages sonores par Thierry Madiot et Ziph, Ana-R (3 et 4 avril, à partir de 15h) ; ciné-concert « Frigo et la baleine » (3 et 4 avril, 15h) ; ciné-concert « La Princesse aux huîtres » (3 avril à 16h, 4 avril à 15h30) ; spectacle « Shannon » (3 avril à 18h, 4 avril à 17h) ; concerts MTM, Mafalpa, Numéro H, Audrey Chen (3 avril à partir de 19h), etc. Entrée libre. Tél. : 03 20 35 01 72. www.muzzix.info

mardi, mars 30 2010

Dieudonné vu par Groland

Puissants et miséreux

Il est des spectacles qui vous imprègnent à la manière de ces brumes d’automne pénétrantes. Ecrit en feu et glace par Yann Reuzeau, ce diptyque parle une langue âpre, torturée, bilieuse. Il raconte des histoires de vies brûlées par le productivisme et dit l’exténuation de l’époque. La première partie nous installe au sein d’une communauté baroque : un groupe de laisséspour- compte inaptes à composer avec un réel trop matériel, mais solidaires. Dans leur grotte sombre planquée sous le périph’, ils suivent le rythme du soleil mais font preuve d’une électricité rageuse ! Puis, place à la France d’en haut. Perchées sur un luxueux plateau, des silhouettes hiératiques et solitaires se découpent sous un ciel d’orage. Ici, tout le monde avance masqué : le père démiurge, la fille aussi manipulatrice que Messaline, l’héritier mû par le sentiment impérieux que sa vie se joue ailleurs... D’un côté, la mouise, la démerde, le manque ; de l’autre, le pouvoir, la spéculation et le cynisme élevés dans la pure laine vierge des nantis. Deux mondes qui se répondent sans jamais se rencontrer. Aucun apitoiement bon teint, aucune morale ni jugement dans ces précipités de vie dont la tension latente et les accès de violence saisissent. Rien que du brut, à cogiter, à rire ou à pleurer.

Comment avoir une place dans le monde ?

Cette question aussi politique qu’intime hante ce spectacle qui scrute aussi les dérèglements affectifs, les névroses familiales et les meurtrissures sociales dans les faits les plus ténus. La beauté de la pièce tient dans la justesse intuitive avec laquelle l’auteur se branche sur l’époque, dans sa capacité à rendre incandescentes toutes ces vies dans leur complexité infinie et leur grâce blessée. On hésite à sortir d’écrasantes références mais c’est bien du côté du Pasolini d’“Accatone” ou du Buñuel de “Los Olvidados” que semble avoir germé ce florilège de destins. La mise en scène sèche et nerveuse (aucun effet démonstratif) y trouve sa pleine expression, soutenue par des comédiens irréprochables : David Nathanson et Romain Sandère (épatants en trublions asociaux), Marine Martin-Ehlinger (froide comme un trader avant la crise), Morgan Perez (médiateur affûté), Damien Ricour (bombe à déflagration assurée) et Sophie Vonlanthen, qui cisèle un personnage féminin d’une densité poignante. Coup de chapeau spécial enfin à Jean-Luc Debattice : avec sa présence singulière, sa générosité et la modestie de son jeu, il fait ici merveille. Ce spectacle se dévore pour le sujet, qui prend une résonance aiguë à l’aune de la crise, et se déguste pour la manière. Epaulé par Sandra Poirier (mise en scène), Laurent Vonlanthen (musique), François-Eric Valentin (lumières) et Jack Percher (décors), Yann Reuzeau a bossé deux bonnes années sur ce superbe échantillon de théâtre-vérité. Notre bonheur le récompense.

Aïssa Maïga, nouveau visage du cinéma français

Perle noire du cinéma français, Aïssa Maïga balade sa fraîcheur et sa profondeur des “Poupées russes” à “Bamako”, en portant haut à la fois ses racines et les couleurs de la France métissée d’aujourd’hui. Normal, donc, que le Festival de films de femmes de Créteil ait décidé de rendre hommage à la jeune comédienne.

Comment avez-vous réagi lorsque vous avez appris que le Festival de films de femmes de Créteil voulait vous rendre hommage ?

Aïssa Maïga : Pas très bien dans un premier temps (rires). Je ne suis pas un oiseau tombé du nid, mais je trouvais que le terme “hommage” était inapproprié par rapport à mon parcours. Je suis encore loin d’être une femme qui peut se retourner et déjà faire le bilan d’une vie. Ça m’a donc fait un petit peu peur. Mais comme cette année, le festival met en avant les cinéastes africaines, je me suis sentie un peu plus à ma place, légitime.

Y a-t-il une différence entre un film réalisé par une femme et un film réalisé par un homme ?

Non, il y a des cinéastes que j’admire en général et je ne suis pas plus attirée par un film parce qu’il est fait par une femme. Après, ce que je constate en tant que comédienne, c’est que souvent les imaginaires sont masculins. La femme reste un objet, on partage rarement son point de vue. On est “la femme de”, “la fille de”, “la mère de”, plutôt que le personnage par lequel passe véritablement le propos des réalisateurs hommes. Il y a peut-être des questions à se poser sur la façon dont notre regard continue à se construire, après des millénaires de traitements inégaux entre les hommes et les femmes.

Et vous, vous avez été confrontée à ces inégalités ?

J’ai surtout connu pendant des années la discrimination dans le cinéma français, et aujourd’hui je bénéficie d’un truc “exceptionnel” en tant que comédienne, qui fait qu’on me propose des rôles plus variés qui correspondent à ma double expérience de Française et de Malienne-Sénégalaise. Mais en tant que citoyenne, je trouve cela encore insuffisant. Le changement est vraiment long à venir.

Vous avez l’impression d’être un peu la seule à tourner ?

Oui. Je constate qu’il n’y a pas de changements pour la majorité. Il n’y a pas encore eu de “banalisation”, de distribution un peu plus large des rôles. Pendant longtemps, quand j’arrivais à un casting, on me regardait vraiment comme si je venais d’une autre planète. C’est très étrange, après avoir côtoyé les gens qui sont en face de vous, d’être considéré comme ça par eux. C’est très agressif. Il fallait vraiment de la combativité pour continuer, mais pas trop pour que ça ne se retourne pas contre moi.

Depuis, il y a un véritable engouement pour vous ?

Engouement, engouement, je ne suis pas non plus devenue Catherine Deneuve ! Il y a encore plein de choses que j’ai envie de faire.

Mais qu’est-ce qui fait que ça marche bien pour vous ?

J’ai sans doute bénéficié de ce qu’on a appelé la discrimination positive. Ça sous-entendait que le système rejetait des gens qui ne devaient pas l’être. On est sorti un peu de l’anecdotique pour dresser un tableau de la France qui n’était pas très positif. Comme j’étais déjà reconnue par certains producteurs, ça a été porteur de sens à ce moment-là. D’ailleurs, on m’a souvent parlé de Cédric Klapisch et de mon rôle dans “Les Poupées russes”. Les gens s’étonnaient – et se réjouissaient – du fait que je joue le rôle d’une Parisienne parmi d’autres. C’est complètement fou de penser qu’en 2005, on s’extasiait face à une chose qui devrait pourtant être totalement naturelle. Il suffit de marcher dans les grandes villes de France pour constater qu’il y a un brassage de fait. Mais le cinéma est un peu en retard dans ce domaine, et ne profite pas de cette richesse-là à l’écran. Cependant, j’ai quand même eu la chance d’obtenir des rôles dans des films populaires comme “Les Poupées russes” ou “L’un reste, l’autre part”. Ils m’ont fait connaître auprès d’autres metteurs en scène, qui m’ont offert des rôles non stéréotypés.

Que vous dit-on quand on vous reconnaît dans la rue ?

« Continuez ! », « On est fier de vous »… Et ça, ça vient de Noirs ou de Blancs, c’est drôle. Et sinon, on me demande : « Vous avez joué dans “L’Auberge espagnole 2” ? » (rires) Ou « Vous êtes vachement plus grande dans les films qu’en vrai. » Et parfois, on me dit : « Votre tête me dit quelque chose. » Dans ces cas-là, il vaut mieux ne pas répondre : « Je suis actrice », parce qu’alors on vous rétorque : « Non, non, vous habitez dans tel quartier, c’est là que je vous ai vue. » Et ça, ça calme !

Vous assistez aussi régulièrement aux défilés de haute couture. Quel genre de fashion victim êtes-vous ?

Je ne suis pas une victime, d’abord ! (rires) Ce que j’aime, c’est la démarche des créateurs. Je peux être touchée par plein de choses différentes, de Vanessa Bruno à Lagerfeld. Et puis, j’aime suivre leur travail. Ça m’inspire pour m’habiller. Je vois ce qu’ils s’autorisent à faire. Tout ça, c’est un travail de dingue que je n’aurais jamais imaginé avant d’approcher ces gens-là. A chaque fois, ça me renvoie à mon propre travail, et au soin qu’il faut apporter à chaque chose qu’on fait.

Un mot de conclusion ?

Pourquoi conclure ? A bientôt… (rires) Je vois sur votre liste de questions que vous ne m’avez pas demandé : « Quels sont vos rêves ? »

Quels sont vos rêves, alors ?

Je n’ai pas dit que j’allais y répondre (rires).

La playlist de Aïssa Maïga

« “Gainsbourg” de Joann Sfar, avec ce regard tellement singulier et cette liberté de ton, c’est très réjouissant, voire jubilatoire. Je n’ai pas trouvé le film parfait, mais j’étais heureuse à plein de moments. C’est une vraie proposition de cinéma. En musique, je fais le grand écart entre Birdy Nam Nam et le “Requiem” de Mozart que j’écoute en boucle. Et en livre, “L’Enigme du retour” de Dany Laferrière. J’aime beaucoup cet auteur. »

filmographie sélective de Aïssa Maïga

“L’Age d’homme... maintenant ou jamais” de Raphael Fejtö (2007) “Prête-moi ta main” d’Eric Lartigau (2006) “Bamako” d’Abderrahmane Sissako (2006) “Je vais bien, ne t’en fais pas” de Philippe Lioret (2006) “Paris, je t’aime” d’Oliver Schmitz (film collectif, 2006) “Les Poupées russes” de Cédric Klapisch (2005) “Caché” de Michael Haneke (2005) “L’un reste, l’autre part” de Claude Berri (2005)

Le film Robin des bois

Dix ans après Gladiator, Ridley Scott et Russell Crowe revisitent une nouvelle fois l’histoire et les légendes avec Robin des bois. Une version plus guerrière, plus réaliste et moins fleur bleue que celles auxquelles nous ont habitués Kevin Costner, Sean Connery ou Errol Flynn. Attention, ça va balancer.

Dans la grande saga du cinéma “Nouveau look pour une nouvelle vie : tous les héros ont droit à une seconde chance”, il y a eu James Bond et l’avant/après-Daniel Craig ; Batman ressuscité par Christopher Nolan ; et Sherlock Holmes sur le point de connaître un nouveau départ grâce à Guy Ritchie. Le Robin des bois de Ridley Scott et Russell Crowe n’est pas cet archer hors-la-loi qui partage son temps entre se pâmer d’amour pour la douce Marianne et voler aux riches pour distribuer aux pauvres. A vrai dire, il n’est pas encore Robin des bois, mais Robin de Loxley, un soldat qui suit Richard Coeur de Lion dans ses croisades depuis dix ans, et qui est sur le point de regagner l’Angleterre pour y trouver un pays à l’agonie. « De quoi vous souvenez-vous exactement de Robin des bois ?, demande Ridley Scott, l’oeil malicieux. De pas grand-chose. Donc l’idée de ce nom, de ce titre, est plus vivante que les faits. L’une des difficultés de faire ce film est d’ôter l’idée que les gens se font de ce personnage, pour la changer en une histoire originale, ce que j’ai fait en choisissant un récit basé sur une époque économique désastreuse pour l’Angleterre, due au financement des croisades d’Henri II et de Richard Coeur de Lion. » Un discours soutenu par un Russell Crowe plus charmant et abordable que jamais. « S’il y avait eu un “Robin des bois” qui avait véritablement marqué l’histoire du cinéma, nous n’aurions pas tourné ce film. Robin des bois, prince des voleurs ressemblait à un clip de Bon Jovi, soyons sérieux ! Ce qui nous intéresse, c’est de montrer les véritables enjeux de l’époque, et ce qui a façonné l’homme qui est devenu Robin des bois. »

Promenons-nous dans les bois

En ce 23 juillet 2009, la production en est déjà à son quatre-vingtième jour de tournage. Des arbres de Bourne Woods s’élèvent des cris de bataille. En même temps, dans une forêt à 180 kilomètres au sudouest de Londres, personne ne vous entendra crier. Ni charger une forteresse, d’ailleurs. « C’est l’une des séquences d’ouverture du film, explique le producteur Brian Grazer. Voici notre version du château français de Chalus où va mourir Richard Coeur de Lion. Après vingt à trente ans passés aux croisades, il est sur le point de regagner l’Angleterre. Mais cette dernière bataille va mal tourner. Richard est tué accidentellement par un cuisinier qui décoche une flèche du haut des remparts. La flèche ira transpercer sa gorge. L’histoire dit qu’il mit deux jours à mourir, mais pas dans notre version. » Charitable. La nuit est déjà tombée. Tandis qu’une cinquantaine de soldats britanniques attaquent de front la façade massive de la forteresse, entre les (faux) cadavres de chevaux et de flèches, à 300 mètres en contrebas de la colline, c’est une tout autre ambiance qui anime le camp de base de Richard Coeur de Lion. Sur un plateau de terre noire et de crottin de cheval s’éparpillent les tentes de soldats, les brasiers incandescents, des piles de boucliers et de glaives, des tonneaux et des paniers en osiers et les étendards bordeaux aux deux lions dorés, le blason de Richard. On s’y croirait. « Ça, c’est un plateau de taille moyenne pour nous, précise Brian Grazer. Nous avons construit tout le village de Nottingham sur 2 500 m2. C’était notre plus gros plateau. » Voilà donc à quoi ressemble un film à 130 millions de dollars. Impressionnant.

Mise aux poings

Dans un coin du camp, c’est autour d’une toile tirée sur quatre poteaux de bois que s’est regroupée la majorité des troupes. Cent cinquante barbus en costumes crasseux s’enthousiasment pour deux gus en train de s’envoyer dans le décor. L’un d’eux n’est autre que Russell Crowe, tout de cuir marron vêtu. Y a pas à dire, c’est quand même plus viril qu’une paire de collants verts. Il semble que Russell ait mal choisi son adversaire. Face à lui, Kevin Durand, alias Petit Jean. Etrange sobriquet pour cette montagne de muscles. « Robin tient une sorte de casino où il organise des paris, explique Russell Crowe. Là, Petit Jean est furieux d’avoir encore perdu et se met à se battre contre Robin, ce qui n’est pas exactement une bonne idée, étant donné qu’il fait 2,40 mètres pour 110 kilos. » Effectivement. Russell tente une droite au visage. Loupé. Tout juste étourdi, le molosse bazarde la table. Russell se suspend à une poutre pour lui flanquer un coup de pied à la poitrine qui repousse son adversaire au loin. Enfin, juste un temps. Le mastodonte l’attrape pour l’envoyer dans la foule. Russell est sonné. Tel un arbitre dans un combat de boxe, Ridley Scott intervient pour montrer à son acteur comment porter son coup. Il va falloir refaire la prise. Russell n’a pas fini de suer.

Gladiator, Robin des bois, même combat ?

En dehors des studios Pinewood et Sheperton, c’est sans doute dans ces bois que se tournent le plus de films en Angleterre. Les tournages d’Harry Potter, du Choc des titans et même de Gladiator ont déjà parcouru ces forêts. Difficile de ne pas évoquer Gladiator à voir la mine mal rasée et le cheveu court de Russell Crowe. « Je m’étais laissé pousser les cheveux mais ça me gênait quand je m’entraînais à l’arc. En Australie, il y avait certains jours où je tirais jusqu’à deux cents flèches. J’en avais assez de me retrouver avec cette masse collante sur ma nuque, alors je m’en suis débarrassé. Là, c’est vrai que l’on s’est dit que ça ressemblait un peu à Maximus. Et puis Ridley m’a dit quelque chose comme : “Puisqu’on est déjà en train de piller l’histoire, autant se piller soi-même.” Mais si Gladiator était une métaphore sur la mort, Robin des bois parle d’une renaissance. » Rien à voir, donc. «Entre Gladiator et Robin des bois, il y a 785 ans d’écart, développe Ridley Scott. J’ai fait Les Duellistes, Kingdom of Heaven, Gladiator. Pour moi, il y a quelque chose de plus exotique dans le film d’époque que dans les films contemporains. »

Cate Blanchett, une nouvelle Dame Marianne

Tandis que sur le plateau, Russell Crowe et son copain le géant continuent de se distribuer des pains dans une ambiance de franche camaraderie, on s’interroge sur la place accordée à la romance dans cette nouvelle version de Robin des bois. C’est Cate Blanchett qui incarne Dame Marianne. La belle a beau avoir déjà tiré sa révérence après avoir terminé l’ensemble de ses scènes quelques jours plus tôt, elle a laissé un souvenir vivace chez Ridley Scott. « Si Russell apporte sa force et sa détermination à Robin des bois, à l’écran, Cate est son équivalent féminin. Entre eux deux, c’était un mariage parfait. Généralement, Marianne est représentée comme la dame à sauver, un archétype de personnage féminin qui irrite particulièrement les actrices. Notre Marianne n’a plus rien à voir avec ça. De plus, nous voulions éviter par-dessus tout d’en faire le point central du film. » A Nottingham, la lady campée par Cate Blanchett sera donc une femme qui fait tourner un domaine ruiné par les taxes, récure les écuries, et n’hésite pas à prendre les armes quand il le faut. Un monde d’hommes, qu’on vous disait. Il est près de 23 h 30. Russell Crowe a eu son compte de châtaignes pour la soirée. La scène est dans la boîte, mais il ne semble pas encore prêt à quitter le feu des projecteurs. Une guitare surgit de nulle part pour tomber entre ses mains. Comme pour remercier les centaines de figurants frigorifiés qui l’ont entouré toute la soirée, il taquine les cordes de sa guitare sur Beautiful Girl, de Sean Kingston, tandis que Scott Grimes, le doc rouquin d’Urgences qui incarne Will Scarlett, l’un des compagnons d’arme de Robin, chante avec une voix sidérante, à laquelle on ne s’attendait pas vraiment.En l’espace de dix minutes, ce qui était un ring s’est changé en scène improvisée. Kevin Durand et Russell Crowe entraînent l’assemblée à reprendre le refrain. Finalement, il ne fait plus si froid que ça par ici. On va peut-être encore s’attarder un peu. Au moins le temps de récupérer une dernière confidence de Ridley Scott. « En fait, vous savez, Robin des bois n’est pas du tout l’un de mes héros d’enfance. Je préférais l’ours Rupert, Le justicier solitaire et Roy Rogers. Je voulais être un cow-boy jusqu’à mes 18 ans. Mes parents me prenaient pour un attardé. » Il semble qu’il ne s’en soit pas trop mal sorti.

page 3 de 3 -